Haendel Marriner
L’odyssée Haendel de Sir Neville Marriner serait-elle le moins repéré de ses voyages ? Dispersée entre plusieurs labels, son centre se trouve pourtant chez Argo, part majeure, et fondatrice du coffret qu’assemble aujourd’hui Cyrus Meher-Homji.
L’Academy à ses débuts s’y essaya avant pour trois Concertos de l’Opus 6, étiquette L’Oiseau-Lyre. Tout y était déjà dit, le geste alerte, la battue précise mais jamais oppressante, la lumière et l’élan, vertus haendéliennes s’il en fut, la précision sans la raideur, la polyphonie sans la rhétorique, et même une part des couleurs que les praticiens historiquement informés retrouvaient. Sir Neville Marriner ne passa jamais ce Rubicon, c’est qu’il avait l’esprit et cela lui suffisait.
Il invitera George Malcolm pour tous les Concertos pour orgue dont la verdeur servira de modèle à Trevor Pinnock lui-même, qui n’en retrouvera pas la lyrique, tempi passati. C’était faire acte d’allégeance à ces musiciens anglais (et d’abord londoniens, donnée essentielle), qui, du temps de Thurston Dart, créaient Philomusica avant l’avènement de la révolution, et avaient chéri tout un répertoire disparu ; chef de chœur, claveciniste, organiste, chef de bande, George Malcolm fut tout cela et l’entendre ici confirme sa stature.
Après des Concerti grossi émaillant avec sensibilité et exactitude la discographie au long des années soixante, pionnières en somme d’un certain renouveau après les expériences signées Ansermet, Lehmann ou Scherchen, les années 70 opèrent une bascule.
Encore quelques Concertos pour orgue, puis un Messie étreignant un chœur tout neuf et un organiste itou (Christopher Hogwood, il était déjà de la fête des Concerti grossi, mais au clavecin), alerte, emporté, diseur, s’affranchissant de la tradition, et offrant un cast rayonnant.
Ce ne sera pourtant pas le trésor absolu de cette décennie, pas plus qu’un Acis and Galatea leste, passionnant à vrai dire, mais qui doit céder le pas devant ce Jephta miraculeux de tendresse où rayonne l’Iphis de Margaret Marshall. Écoutez seulement…