Vous avez dit Romance ? de Marceline Desbordes-Valmore à Paul Verlaine, Françoise Masset, soprano Françoise Tillard, piano

Le répertoire de la romance est si vaste et divers que tenter un programme qui en serait un panorama est un acte purement subjectif qui ne résulte que du bon plaisir des interprètes. La définition de la romance appelle une réponse plurielle et sans frontières. Notre principe de sélection a été la valeur littéraire des poèmes et l’originalité du traitement musical. Marceline Desbordes-Valmore, admirée par Paul Verlaine, nous invite à entamer notre exploration, déchirée entre écrire et ne pas écrire, et Chateaubriand lui emboîte le pas, entre souvenance et deuil. Pierre-Jean Garat et Antoine-Joseph Romagnesi, auteurs reconnus de romances, contemporains des poètes, mettent en musique sobrement, voire naïvement, leurs vers, tandis qu’à la fin du XIXe siècle, le Prince Edmond de Polignac, qui mentionne pudiquement sur sa partition Paroles de Mme ***, et Amy Beach se reconnaissent dans ces vers d’un autre âge et en traduisent l’émotion avec talent et sensibilité. Nous voilà installés dans l’intimité d’un salon où l’on distille paroles et musiques du bout des lèvres, avec retenue et pudeur. Paul Verlaine salue « le piano que baise une main frêle », écho de la main vagabonde de notre couverture sautillant sur les touches du clavier. Ah, le piano ancien et vénérable de notre enregistrement a voulu quelquefois s’épancher avec nous et se plaindre doucement : que ses bruits intempestifs de pédales et d’étouffoirs nous soient pardonnés… Parfois nous semblons faire un pas de côté : la romance s’invite au théâtre et crée un moment de simplicité et d’émotion au sein des opéras comiques ; par son immédiateté voire son caractère répétitif, elle rivalise avec la chanson : Joseph Kosma, sur les vers d’Henri Bassis, lui rend hommage, conscient de ce qu’il lui doit, entre rythme obsédant et harmonies entêtantes ; enfin, instrumentale, il ne lui manque que la parole.